156 MILLIARDS D’EUROS : C’EST LE COUT SOCIAL DU BRUIT EN FRANCE, PAR AN !

Laurianne ROSSI, présidente du Conseil National du Bruit (CNB), députée des Hauts-de-Seine et questeure de l’Assemblée nationale, et l’Agence de la Transition écologique (ADEME) dévoilent les résultats de leur étude sur le coût social du bruit en France. Les conclusions montrent que l’impact du bruit représente un coût très élevé pour la société française dans son ensemble. L’étude illustre aussi toute la pertinence des mesures d’évitement du bruit, les bénéfices sociaux apportés étant très largement supérieurs aux coûts des investissements nécessaires, notamment lorsque les solutions mises en œuvre présentent des co-bénéfices avec d’autres enjeux écologiques.

Le bruit constitue une préoccupation majeure des Français dans leur vie quotidienne, que ce soit au sein de leur logement, dans leurs déplacements, au cours de leurs activités de loisirs ou sur leur lieu de travail et également un enjeu important pour les décideurs publics. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS, 2018), le bruit représente le second facteur environnemental provoquant le plus de dommages sanitaires en Europe, derrière la pollution atmosphérique : de l’ordre de 20 % de la population européenne (soit plus de 100 millions de personnes) est exposée de manière chronique à des niveaux de bruit préjudiciables à la santé humaine.

L’ADEME, avec l’appui du Conseil National du Bruit, a confié au groupement de prestataires I-Care & Consult et Energies Demain le soin de :

  • évaluer le coût social du bruit en France. Il s’agit des coûts, marchands ou non, supportés par tous les français.
  • examiner à titre d’exemples la rentabilité de quelques mesures d’évitement simultané du bruit et de la pollution de l’air.

Le bruit génère des coûts dans tous les domaines de la vie…

Dans cette étude, le coût social est attribué à trois familles de sources de bruit : le transport, le voisinage et le milieu du travail, auxquelles s’ajoutent les dépenses transversales de surveillance, d’information, d’études et recherche.

Pour chacune de ces familles ont été distingués :

  • Les effets sanitaires induits par le bruit : gêne, perturbations du sommeil, maladies cardiovasculaires, obésité, diabète, troubles de la santé mentale, difficultés d’apprentissage, médication, hospitalisation, maladies et accidents professionnels.
  • Les effets non sanitaires induits par le bruit : pertes de productivité et dépréciation immobilière.

Les évaluations ont été faites en tenant compte de deux types de coûts :

  • Les coûts marchands, correspondant aux dépenses directement quantifiables,
  • Les coûts non marchands, estimés par la valorisation des années de vie en bonne santé perdues et de la mortalité prématurée du fait du bruit, qui représentent la majeure partie du coût social du bruit (86%).

Le coût social du bruit en France est ainsi estimé à 155,7 milliards d’euros par an, sur la base des données et connaissances disponibles.

68,4% de ce coût social, soit 106,4 Md€/an, correspond au bruit des transports, principalement le bruit routier qui représente 51,8% du coût total, suivi du bruit aérien (9,4%) et du bruit ferroviaire (7,2%).

Le coût social lié au bruit de voisinage, pour lequel il existe très peu de données chiffrées, est évalué à 26,3 Md€/an (16,9% du coût total) ; il se décompose en bruit émis par les particuliers (11,4%), bruit des chantiers (3,4%) et bruit généré dans l’environnement par les activités professionnelles (2,1%).

Le coût social du bruit en milieu du travail, estimé à 21 Md€/an (13,5% du total), se répartit entre les milieux industriel et tertiaire, scolaire et hospitalier.

Les dépenses transversales (surveillance, information, études et recherche) représentent 2 Md€/an, soit 1,3% du coût social total.

Cette étude aboutit à une augmentation très significative (+98,3 Md€/an) par rapport à la première étude publiée par l’ADEME en 2016. Trois raisons expliquent cette importante évolution de l’estimation :

  1. l’élargissement du périmètre d’étude avec la prise en compte de nouveaux effets sanitaires (obésité, hypertension, santé mentale, diabète), de nouvelles sources de bruit (chantiers et milieu hospitalier) et d’un nouveau poste de dépenses (surveillance, information, études et recherche): impact de +51,9 Md€/an.
  2. la mise à jour des méthodes d’évaluation, à périmètre d’effets et de postes de dépenses constant par rapport à celui de l’étude de 2016, pour tenir compte des nouvelles connaissances et recommandations (actualisation des courbes dose-réponse, alignement de la valeur d’une année de vie avec d’autres études dont celle sur les coûts sociaux de la pollution de l’air afin de valoriser les pertes de bien-être, ainsi que des hypothèses d’estimation des pertes de productivité et de la dépréciation immobilière): impact de +40,8 Md€/an.
  3. l’amélioration du décompte des populations exposées au bruit des transports: impact de +5,6 Md€/an.

Ademe Répartition du bruit des transports

… des coûts amplement évitables !

Une part importante des coûts sociaux du bruit peut être évitée en exploitant les co-bénéfices avec d’autres enjeux écologiques, comme la réduction de la pollution atmosphérique.

À titre d’exemple, quatre mesures d’évitement simultané du bruit et de la pollution de l’air ont été analysées dans l’étude ; elles présentent toutes un ratio très intéressant entre les bénéfices attendus et les coûts investis : la réduction des vitesses sur voies rapides (ratio bénéfices/coûts sur dix ans de 685), la mise en place de zones à faibles émissions (ratio bénéfices/coûts sur 4 ans de 13), l’amélioration de la qualité acoustique des bâtiments scolaires (ratio annuel bénéfices/coûts de 10) et l’application d’une charte « chantier propre » (ratio annuel bénéfices/coûts de 3).

Cette étude ouvre ainsi un vaste champ prospectif dans le domaine de l’amélioration de l’environnement sonore. Elle fournit des éléments robustes utiles aux analyses coûts bénéfices permettant de comparer le coût financier des mesures d’atténuation du bruit aux bénéfices sociaux qui pourraient en découler en termes d’amélioration du bien-être de la population et de coûts évités pour la collectivité dans son ensemble.

Pour en savoir plus :